L’enfer sur l’étagère

Je suis le 1er à rentrer à l’appart de mon bien aimé. Dans l’ascenseur j’hésite entre 5ème et 7ème étage… ah oui, c’est bien le 5ème. Depuis l’entrée on a vue à droite sur des étagères de profil, où je distingue vaguement disposés sur l’une d’elles, des morceaux de corps humains qui me sidèrent d’effroi. Il y a une tête de femme aux cheveux roux, une main dont le pouce se termine par une autre main miniature. Tout concorde à entraver mon appréhension visuelle : l’angle du meuble, la peur paralysante, ainsi qu’une sensation de pression occulaire qui gêne la vision. La tête se met à me parler en se moquant de moi, elle me dénigre. Saleté de démon. J’ai beau rassembler mon courage pour m’avancer, l’image se dérobe au regard, recule en pivotant, retirant toujours l’ensemble des restes humains dans l’angle mort. Tout au plus je parviens à voir son oeil droit exhorbité. Elle continue à rire, me méprise, me nargue. Cette fois je tends la main pour toucher ses doigts froids, puisque mes yeux me font défaut. L’horreur prend une consistance plus tangible dans cette épouvante tactile. Chéri arrive enfin. Je lui demande s’il voit bien ce que je vois, par pitié, qu’il me dise ce qu’il voit ! C’est bien une tête de femme qui ricane ?! Me regardant avec de grands yeux qui ont l’air de me prendre pour un imbécile il me lance « Mais enfin, c’est l’écran de télé qui te met dans cet état ? ». Aaaah ! Non c’est le téléviseur ? Mais pourtant je sens bien ce que j’ai au bout de mes doigts ! Est-ce que je deviens fou ?!